Ce tablier de soie est un tablier maçonnique du XIXe siècle. Le tablier rappelle le vêtement de travail des tailleurs de pierre du Moyen Âge et est un vêtement symbolique porté par les francs-maçons du monde entier. Traditionnellement, dans la plupart des pays, il est en peau d'agneau ou en cuir blanc. Souvent, le tablier blanc représente le grade d'apprenti franc-maçon, tandis que les grades supérieurs et les dignitaires se distinguent par des tabliers décorés et brodés. Le rabat situé à l'extrémité supérieure peut également être utilisé comme insigne de grade : Les compagnons fixent le rabat à leurs vêtements, les maîtres le portent librement rabattu vers l'avant.
Le présent tablier est brodé de symboles maçonniques : on y trouve entre autres le compas et le fer à cheval, l'œil de la Providence ou l'œil de Dieu (un triangle avec une couronne de rayons et le mot « Yahvé » inscrit, nom hébreu de Dieu). Les initiales « J », « B » et « M » signifient « Jakin », « Boaz » et « Mac Benac ». Ils se réfèrent d'une part à des noms de colonnes du Temple de Jérusalem et désignent d'autre part les trois grades de la franc-maçonnerie bleue de Saint-Jean. La bordure bleue du tablier doit également être comprise comme un insigne funéraire.
Le tablier se trouvait en possession du directeur de banque Friedrich Rudolf Dacqué (1871-1953) de Neustadt et fut transmis à la Société historique du Palatinat après sa mort. Il est possible qu'il ait appartenu à l'origine à Johann Theobald Dacqué, cofondateur de la société littéraire fondée en 1790 à Neustadt, qui devint la loge maçonnique de Neustadt en 1809. Il pourrait aussi avoir appartenu à Ludwig Theobald Dacqué qui, à 25 ans à peine, devint le premier secrétaire de la loge. Vers 1800, les loges maçonniques se multiplièrent dans le Palatinat, alors français, et leurs membres se composaient en partie d'anciens clubs jacobins. On y communiquait souvent en français et on y contribuait à la diffusion de la langue française dans les territoires allemands occupés. À Neustadt, on trouva en outre une affiliation avec le Grand Orient, la Grande Loge de Paris. Cela explique pourquoi, en 1811, la loge de Neustadt fut baptisée « Trois flammes vivantes á I'Orient de Neustadt ». [Johanna Kätzel]
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